mardi, 30 janvier 2018 07:05

Interview du député Jean Kissi du CAR : «Le samedi 27 janvier dernier, mon chauffeur a été attaqué… »

    Interview du député Jean Kissi du CAR : «Le samedi 27 janvier dernier, mon chauffeur a été attaqué… »

    ©Afreepress-(Lomé, le 30 janvier 2018)- Dans cette interview accordée à l’Agence de presse Afreepress, le Député Jean Kissi du Comité d’Action pour le Renouveau (CAR), parti membre de la coalition des 14 partis de l’opposition réitère sa foi au dialogue pour une sortie de crise au Togo. Une occasion que saisit le député pour dénoncer des « représailles » auxquels ses proches et lui sont l’objet. Il est revenu sur un incident qui selon lui, a failli coûter la vie à son chauffeur. 

    Il s’est également intéressé à la dernière sortie médiatique du Ministre de l’Agriculture, Ouro-Koura Aguadazi qu’il condamne vigoureusement.

    Lire l’intégralité de l’interview.

    Afreepress : Bonjour Jean Kissi. Vous êtes député à l’Assemblée Nationale et votre parti le Comité d’Action pour le Renouveau (CAR) est membre de la coalition des 14 partis de l’opposition qui est dans les rues depuis cinq mois. Alors dites-nous d’abord comment votre lutte évolue.

    Jean Kissi : Merci. Je crois que les cinq mois de lutte ont porté leurs fruits et il faut maintenant arriver à engranger des résultats. Vous savez qu’au CAR, notre doctrine a été toujours le couplage du feu au marteau. C’est-à-dire qu’on considère que les problèmes dans un pays ne peuvent être résolus que par le dialogue. Mais pour arriver à un bon dialogue et obtenir des résultats, il faut la pression.

    Les cinq mois que nous avons passés constituent des moments de pression. Le peuple a fait son travail. Il a en assez fait et il continue de le faire. Nous sommes arrivés maintenant à l’étape du marteau. Les politiques ont en ce moment la responsabilité d’utiliser cet élan que le peuple a déployé pour obtenir des résultats. Donc c’est le moment d’engranger des résultats et c’est la responsabilité que nous avons.

    Afreepress : Le dialogue annoncé depuis quelques mois se fait toujours attendre. Est-ce que vous croyez que l’opposition est vraiment disposée à aller au dialogue puisqu’on reproche à la coalition de multiplier les préalables pour refuser les discussions ?

    Jean Kissi : Vous savez que le pouvoir n’a pas envie d’aller au dialogue. Ils ont dans leur tête l’obsession du référendum et n’ont pas vraiment envie d’aller au dialogue. Ce sont eux qui multiplient les manœuvres et les provocations de toutes sortes.

    Nos manifestations sont réprimées avec des gaz lacrymogènes. Je ne crois pas que ce soit l’opposition qui multiplie les préalables à volonté parce qu’un certain nombre de faits que nous évoquons se passent au fil des jours. Ces derniers jours, il y a un certain nombre d’arrestations dont celle des membres de Nubuéké, des trois membres du Parti National Panafricain (PNP) qui ont été arrêtés à Bafilo et relâchés. Ce sont des évènements qui sont intervenus alors que le pouvoir dit qu’il est dans les mesures d’apaisement.

    Le pouvoir est dans sa duplicité légendaire. On ne peut pas vouloir une chose et son contraire. Libérer une personne et prendre deux à la place ou libérer deux et puis prendre quatre à la place, ça ne peut pas nous permettre d’évoluer. Le principe du dialogue commande que toutes ces personnes soient libellées afin de faciliter son bon déroulement y compris ceux qui sont détenues dans les affaires des incendies des marchés de Lomé et Kara. Un dossier politique qui dure depuis plusieurs années.

    Nous ne disons pas que le dossier des incendies des marchés doit être enterré. Non ce n’est pas ça. Mais nous demandons la levée du mandat. Le dossier peut se poursuivre parce que nous avons besoin de connaître la vérité sur ce qui s’est passé au niveau des grands marchés de Lomé et de Kara. Aucun Togolais ne peut vouloir qu’on enterre le dossier et qu’on ne connaisse pas la vérité.

    Les dames des marchés ont envie de connaître la vérité. Mais les gens sont arrêtés sans aucune preuve depuis cinq ans. Ceux-là, on peut lever leurs mandats et les libérer et puis le dossier peut continuer au niveau de la justice de manière normale. Vous savez, il est de l’intérêt de nous-mêmes, opposition que le dossier des marchés puisse se poursuivre.

    Si le dossier est enterré, même si nous venons au pouvoir on ne peut pas connaître la vérité. Donc ce ne sont pas des préalables que nous multiplions à volonté. C’est l’essentiel que nous demandons. Nous voulons des vraies mesures d’apaisement.

    Au niveau du pouvoir, ils sont allés plus loin. Ils parlent de mesures de confiance en disant qu'il doit y avoir une confiance entre les acteurs politiques qui nous permette de faire des concessions. On ne peut pas utiliser des termes aussi forts et continuer du jour au lendemain par arrêter les gens, à provoquer les gens et appeler le malheur sur le pays. Ce que le gouvernement fait à travers un certain nombre de ministres est grave. Nous avons écouté ce que le ministre Agadazi a dit la dernière foi. Exploiter le terme djihadiste dans l'affaire togolaise, c'est appeler le malheur sur le pays. C'est inadmissible.

    Afreepress : Il y a eu deux militaires qui sont décédés à Sokodé et le gouvernement a communiqué abondamment autour de ces décès. Mais on vous reproche vous honorable Jean Kissi et Antoine Folly, de jeter un doute sur la véracité des faits. Alors M. Jean Kissi est ce que vous doutez de la mort des deux militaires à Sokodé?

    Jean Kissi : C’est vraiment malheureux l’exploitation que le pouvoir fait de cette affaire. Je suis la première personne à être autorisée par la coalition pour condamner sur radio Victoire Fm, le meurtre des deux militaires quand bien même je n’ai pas vu les corps.

    Deuxième élément. Après les propos de Christophe Tchao et du ministre Trimua Christian, nous avons fait une émission spéciale sur radio Nana Fm sur les questions d’apaisement où on m’a invité en tant que représentant de l’opposition et le député Gagou en tant que représentant du pouvoir. Ensemble nous avons condamné les faits qui se sont passés et les propos tenus dans un camp comme dans l’autre. Nous nous sommes excusés au nom de tous.

    Tertio. Dans l’une de nos déclarations au cours de nos manifestations, Antoine Folly et moi  avions condamné la mort de ces militaires et ça été dit dans le communique que nous avons publié après.

    Mais en même temps, en condamnant la mort de ces militaires qui sont des Togolais comme les autres, nous avons condamné aussi la mort des vingt autres Togolais tués par balles et nous avons demandé la mise en place d’un comité d’enquête sur cette question parce que les versions rapportées par les membres du gouvernement y compris le Chef de l’Etat ont été différentes. Les versions qu’ils ont servies sur la manière dont les militaires ont trouvé la mort n’ont pas été concordantes.

    L’exploitation de la mort d’une personne pour assouvir ses besoins politiques, moi je trouve que c’est malheureux et diabolique. Et quand on profite de cette expression « djihadisme » pour appeler le malheur sur le pays, c’est aussi malheureux. De la bouche de nos simples militants dans les rues, nous ne pouvons même pas accepter qu’ils sortent le mot djihadisme jusqu’à l’accepter du côté des responsables de l’opposition ou des responsables du gouvernement. C’est vraiment malheureux !

    Quand le Ministre Agadazi fait ça, il a l’impression que c’est les autres qui vont en périr. Quand tu appelles le malheur sur ton pays, tu crois que c’est les autres qui vont en périr et que toi et tes proches vous n’êtes pas concernés.

    Quand il dit qu’il y’avait 200 personnes de la population de Sokodé, qui est sa propre population, qui sont des djihadistes et qui sont allés attaquer les militaires, c’est grave. Ce n’est pas parce qu’il a perdu la sympathie de sa population qu’il va traiter son peuple de djihadiste.

    Si moi demain dans mon milieu, je perds un peu de popularité, je dois retourner sur moi-même pour réfléchir et chercher comment regagner la confiance de ma population. Je ne peux pas les traiter de djihadistes.

    Au demeurant, le djihadisme a épargné le Togo jusqu’aujourd’hui.  Ce que les Togolais demandent, c’est la Constitution de 1992. S’ils donnent cette constitution, il n’y aura pas toutes ces manifestations et heurts. La cause du problème togolais, ils le connaissent. Pourquoi ne pas répondre pour qu’on s’attelle maintenant à la reconstruction de porte pays ?

    Afreepress : Voilà des propos qui vous valent des représailles. Est-ce que vous êtes tranquille aujourd’hui?

    Jean Kissi : Il n’y avait pas de manifestation où on ne nous menace pas. Moi à plusieurs reprises lors des manifestations, des gens connus comme inconnus m’appellent pour me menacer. Mais nous prenons notre courage de résister et de faire la manifestation jusqu’au bout et même d’intervenir sur les podiums.

    Il y a des moments, nos familles et nos proches ne dorment pas. Mais ce n’est pas ça qui va nous faire peur. S’ils croient que c’est comme ça ils vont nous faire reculer, moi personnellement ce n’est pas possible. Moi c’est depuis que j’ai 19 ans que je suis dans la lutte. J’ai l’impression que le jour où je suis né la peur était en prison et c’est ça qui me fait résister.

    Le samedi 27 janvier dernier, mon chauffeur qui a été attaqué. Il devait venir le matin à 6 heures chez moi. Quand il a quitté son domicile à 5 heures 10 à Baguida, il a été suivi par un véhicule BMW noir banalisé avec toutes les vitres fumées. Ils l’ont poursuivi et essayé de le ramasser à plusieurs reprises. C’est à la troisième reprise qu’ils sont arrivés finalement à l’avoir. Heureusement qu’il s’en est sorti mais avec des blessures et la moto un peu cassée. Ce qui a fait que j’ai été au village moi-même et ça c’est fréquent.

    Propos recueillis et transcrits par Raphaël A.

     

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